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lundi 2 octobre 2017

ISLANDE - Le Trek du Laugavegur en 4 jours

C'est un article particulier que je vous présente aujourd'hui. Un article qui parle de voyage, mais pas que. Un voyage laisse peu de place à l'imprévu, le sujet est spectateur et la fin n'offre que peu de suspens. Alors qu'une aventure... une aventure fourmille de possibilités riches et diverses quant au déroulement et l'happy end (ou non) du séjour. Le sujet n'est plus un simple spectateur, mais l'acteur principal de son histoire. Une histoire qui évolue, au gré des personnes rencontrées et des chemins foulés.

Bien plus qu'un voyage, je vous invite à revivre mon aventure sur des terres magiques, où le feu et l'eau se jouent des lois de la Physique et où le simple randonneur n'a que peu de place à l'improvisation.

Voici mon histoire en terre inconnue, une aventure rendue exceptionnelle par le défi que nous nous sommes lancés, mon mari et moi, conquérir l'intégralité du célèbre Laugavegur Trail (80km) en un peu moins de 4 jours.


... LANDMANNLAUGAR - ALFTAVATN : 23km ...

Mardi 15 août, 8h30
Dans quelle aventure on s'est encore lancé là ! Il fait froid, il pleuvote, et nous sommes une bonne quarantaine à prendre le bus pour rejoindre Landmannlaugar, départ de la célèbre randonnée du Laugavegur. Bref, tout ce que j'aime... et oui c'est ironique ! Je suis à Rejkyavik, il est 8h30 et le voyage débute ici.
Après une courte nuit à imaginer tous les scénarios possibles, c'est le sac à dos bien chargé (16kg pour moi... une montagne !) qu'on embarque dans un bus 4x4 avec des dizaines d'autres randonneurs de toutes nationalités pour un trajet de 4h. Dans le bus, le temps file à toute vitesse, on se rapproche très vite des montagnes et des grands espaces... déserts et volcaniques.


Volcanique. C'est exactement le mot. Pas un arbre, pas un carré d'herbe. Seulement des nuances de gris, de noir et de jaune. Pourtant, de loin, les paysages semblent bien verdoyants... mais ne vous méprenez pas, il ne s'agit que d'une fine mousse qui pousse sur les roches volcaniques.

Le lieu dit Landmannlaugar est le point de départ du trek et est un accès très touristique aux champs de lave aux alentours. Autant vous dire que ça fourmille de monde par ici en plein mois d'août ! A peine le temps d'enfiler notre lourd fardeau sur le dos que nous voilà déjà lancé sur le sentier. On ne veut pas perdre de temps, et surtout on veut s'éloigner de la foule !

Mardi 15 août, 13h
C'est sous une pluie fine que nous prenons là le départ du Laugavegur pour un parcours d'environ 80km jusqu'à Skogar (nous faisons l'intégralité du parcours). Et nous aimerions mettre moins de 4 jours au lieu de 6 à 7 jours habituellement.
Nothing is impossible

A peine arrivés que nous voilà déjà complètement dépaysés ! Pour quelqu'un comme moi qui n'est que peu sortie de sa France natale, marcher au milieu d'un champ de lave relève de l'extraordinaire. J'ai commencé à lire, il y a quelques semaines, "Seul sur Mars" d'Andy Weir. J'ai l'impression de vivre le quotidien de Mark Watney !!

Le champ de lave traversé, le sentier s'élève peu à peu à travers des fumeroles et des zones recouvertes de cendres encore chaudes. Incroyable ce lieu ! C'est tellement fou de se retrouver là. Le sentier est très agréable et extrêmement bien balisé. La pluie va et vient, mais il ne fait pas chaud. Fini le short au mois d'août, ici c'est doudoune et chaussettes chaudes !

Sac à dos : Gregory (Baroudeur Altitude) ; bâtons : Cimalp
En quelques heures, que de panoramas différents ! Et entre la pluie, le brouillard et les rares éclaircies, les terres volcaniques ressortent différemment et nous laisse sans voix. 1h, 2h, 3h de marche. Le sentier continue à grimper, doucement mais surement. Un plateau rocailleux d'abord, puis nous arrivons sur un immense plateau recouvert de neige. La pluie ne nous épargne pas, les ponchos sont de sortie et le moral est déjà mis à rude épreuve.

Bâtons : Guidetti (Feelactiv) à gauche et Cimalp à droite          Veste : Cimalp

Un 14 août, je sors les gants, j'ai les pieds gelés et je n'ai jamais été aussi contente d'avoir une veste parfaitement imperméable et coupe-vent. Je suis bien en Islande.

Mardi 15 août, 17h
Après près de 4h de marche (on a pique-niqué entre temps), pas très rapides mais bien chargés, nous découvrons le premier refuge du trek : Hrafntinnusker (je vous laisse vous entraîner à le prononcer, bon courage !). L'endroit ne fait pas rêver, surtout par cette météo. Aucun abri pour mettre sa tente et des températures très froides. Tant mieux, on n'a pas prévu de s'éterniser ici puisque nous voulons rejoindre le lac d'Alftavatn, 12km plus loin.


Oh, des français ! Et dans le sens inverse, parfait pour glaner quelques infos et notamment sur le parcours que nous allons faire par la suite : encore une longue portion entre neige et sable noir, dans le brouillard, avant de redescendre vers le lac. Encore trois bonnes heures avant de pouvoir envisager mettre la tente dans un endroit à l'abri du vent. Ok, c'est bon ici la nuit tombe tard !

Heureusement pour nous, la pluie s'efface, les éclaircies nous réchauffent et nos sourires s'illuminent à chaque fois que nous nous hissons sur une crête et que nous découvrons les alentours. Toujours beaucoup de noir, de gris, un peu de vert et de blanc. Mais c'est tellement dépaysant !


J'ai dévoré tellement de blogs, de magasines et de livres sur l'Islande. Je m'attendais à de tels paysages. Mais le vivre, c'est autre chose.

La journée commence à être longue, il est près de 20h et nous ne savons toujours pas où nous allons dormir. Et il fait si froid que je me demande comment on va bien pouvoir se réchauffer ce soir ! Et puis comme une lueur au bout d'un tunnel sombre : une vue dégagée et verdoyante sur le lac, plus bas dans une vallée, marquant la fin de ce plateau aux conditions apocalyptiques.


Mardi 15 août, 20h30
Il est 20h30, 23km dans les pattes et nous avons enfin trouvé notre base pour la nuit ! Un petit vallon, près d'un cours d'eau et pour vue :


En 40min nous voilà installés, changés et prêts à se restaurer avant de plonger dans un sommeil... quelque peu frisquet !


... ALFTAVATN - EMSTRUR : 18km ...

Mercredi 16 août, 9h15
Le moins que l'on puisse dire, c'est que la nuit a été fraîche. Tellement fraîche que la doudoune n'a pas suffit et qu'il a fallu sortir la couverture de survie et s'enfiler dans un grand sac poubelle. Une fois cette isolation faite, nous avons pu fermer l'oeil pour quelques heures.

Ce matin, quel bonheur en ouvrant la tente... le ciel est bleu ! Et le lac, mais qu'il est beau ce lac au pied des volcans ! Vite, étalons nos affaires au soleil pour qu'elles sèchent avant d'engloutir notre petit-déjeuner. Point positif : plus on mange, plus on allège notre paquetage !

WE ARE READY pour notre 2ème journée de marche, avec au programme 18km et deux déserts à traverser.


Après deux rivières à traverser (de l'eau jusqu'aux mollets) et des kilomètres parcourus dans de verts paysages, nous entrons dans un désert subjuguant. Un désert de pierres, avec en plein milieu un sentier dégagé de toux cailloux et en ligne de mire : le col vers le passage au second désert.


Magique pendant quelques heures.
Puis un peu long.
Long et monotone.
Finalement, il est interminable ce désert :-)


Oubliant le défi un peu fou que nous nous sommes lancés sans vraiment y réfléchir, ce 2ème jour est éprouvant. Les épaules sont douloureuses, les jambes lourdes, les pieds déjà meurtris et sujets aux ampoules. Si un emplacement pour poser la tente s'était offert à nous le long de ce parcours sans fin, je crois que nous l'aurions fait. Finalement, 5 jours c'est bien aussi non ? Mais aucun répit, la pluie revient, le froid et le vent aussi, aucun emplacement pour pisser alors je ne vous parle même pas de s'abriter pour dormir.

Il faut avancer et rejoindre le refuge d'Emstrur à la sortie de cette zone désertique.

Mercredi 16 août, 18h30
Savez vous à quel point une douche chaude peut jouer sur le moral d'un randonneur fatigué et courbaturé ? Oui, en plein coeur de l'Islande on peut prendre une douche chaude. 5€ les 5min tout de même, mais heureusement parce que sinon j'y serais restée une heure entière ! Que c'est bon ! On en oublierais (presque) le montage de la tente sous la pluie. Refuge d'Emstrur.



... EMSTRUR - PORSMORK : 16km ...

Jeudi 17 août, 9h00
Voilà une nuit salvatrice où il a fait un peu plus chaud. Comme si la douche avait effacé les traces d'effort de la veille, nous repartons plus facilement ce matin. Le corps s'habitue petite à petit sans doute. A moins que ce soit le sac qui s'allège à force de se goinfrer de pâtes lyophilisées, de semoule au lait, de compotes et de saucisson.

Comme la veille, la météo n'est pas trop mauvaise et nous partons "léger" pour une journée haute en couleurs et surtout en émotions. C'est aujourd'hui que l'on traverse deux rivières plutôt importantes selon les dires...


Toujours plus de panoramas, comme si, en 4 jours, il fallait avoir vu et photographié le maximum de paysages différents. Cette fois, nous descendons au centre de la terre avec des gorges et des ravins à traverser via des ponts ou des passages adaptés. Impressionnant ! Et vous verriez la puissance du fleuve en dessous !


Sur l'intégralité du parcours, il n'y a pas tant de dénivelé (environ 3000m sur les 80km, dont 1400m D+ sur la dernière étape). Pourtant, ça ne fait que monter et descendre ! Rien de bien méchant, mais une alternance de petites côtes bien raides et de descentes bien glissantes. Le paysage change peu à peu, les vallées sont plus verdoyantes et on se rapproche surtout des deux volcans enneigés que l'on franchira lors de la dernière étape : l'Eyjafjällajökull et le Myrdalsjökull.


Tout se passe bien, dans le meilleur des mondes jusqu'à... ce qu'on doive franchir une, puis deux rivières. Les rivières ici, c'est pas rien. Du haut de mes 1m62 j'avais de l'eau jusqu'en haut des cuisses. Et de l'eau qui frise les 2 ou 3°C. Un clavaire à traverser pour ma part ! On ne sent plus ses pieds, le courant et fort et déstabilisant et les rivières sont larges...

Ceci dit, une fois passé, c'est plutôt marrant et on se dit que c'est ça l'aventure ! Avec des bâtons, des sandales de marche et un peu de courage et d'attention ça passe finalement plutôt bien. Un conseil : enlever votre pantalon ! J'ai eu beau le remonter il a quand même été mouillé et vous imaginez bien qu'avec les températures et les nuits fraîches, le linge mouillé ne sèche pas facilement par ici. Je n'ai même pas pris de photo pour immortaliser cela...

Pour se réchauffer, on se remet vite en marche. Cette 2ème rivière marque un tournant dans l'histoire de cette randonnée. C'est tout simplement la fin des paysages volcaniques et désertiques et le début d'un paysage plus verdoyant. On redécouvre la végétation avec un sentiment tout particulier. Les arbres nous paraissent telle une oasis en plein coeur d'un désert ! On s'émerveille devant autant de vert. L'air est un peu plus chaud également, on se rapproche de Porsmork (qui signifie "la forêt de Thor").


Jeudi 17 août, 17h30
Nous descendons dans la vallée de Pormsork mais bifurquons à gauche juste avant pour prendre la direction de Basar. Porsmork est la fin "officielle" du trek du Laugavegur. La fin non officielle, elle, se trouve 28km plus loin, à Skogar, en bord d'océan. C'est ce que nous avons prévu de faire.

Rejoindre Basar, c'est surtout pour réduire le kilométrage de demain. Et il y a des douches chaudes apparemment ! Mais pour atteindre le camping, pas si simple, il faut compter une bonne demi-heure pour traverser l'immense lit de la rivière qui circule au fond de cette vallée. Pas besoin d'enlever les chaussures, il y a quelques ponts là où il faut et pour le reste il n'y a plus d'eau, donc il y a "juste" un lit de pierre.


Après 7h de marche, voilà enfin Basar et son superbe petit camping aux emplacements isolés dans un petit sous bois et à sa douche (presque) chaude. Nous arrivons assez tôt par rapport aux jours précédents, et nous prenons le temps de nous détendre, de bouquiner, de s'étirer et de faire le point sur cette belle aventure. J'ai beau être fière de notre "performance" je ne peux m'empêcher de me dire que le temps passe trop vite, que les photos prises ne me rappelleront que brièvement les émotions que j'ai ressenties en traversant ces terres volcaniques, désertiques et sauvages.

Je profite des derniers rayons de soleil pour fermer les yeux quelques instants et repartir sur ces 58km parcourus en seulement 2 jours et demi. Pour être franche, un paysage aussi "nu" n'a rien d'exceptionnel. Des cailloux, quelques rivières, quelques glaciers, un peu de mousse à certains endroits. Mais tout ensemble, ici au milieu des volcans, ce trek a une saveur particulière. Un sentiment de solitude et de bien-être en même temps, de retour aux sources, de calme. Le temps est suspendu si on prend justement le temps d'en profiter. Les journées sont longues, on ne regarde à peine nos montres. Et pourtant, en si peu de temps, que de paysages différents traversés ! Depuis Landmannlaugar où nous avons pris le départ sous la pluie. Les fumerolles de la 1ère étape que nous avons découverts pour la 1ère fois. Le contraste entre vallée verdoyante et plaine désertique lors de la 2ème étape. Et puis ces rivières à franchir aujourd'hui. L'Islande, il n'y a pas à dire, ça vous marque à jamais !

Trêve de rêverie, il paraît que demain, une grosse étape nous attend. Avalons notre repas du soir et filons vite nous coucher.


... PORSMORK - SKOGAR : 31km ...

Vendredi 18 août, 8h30
Il fait déjà plus chaud qu'au nord. Et la journée s'avère "costaud". Après avoir jeté un coup d'oeil aux cartes et aux différents récits que l'on a pu parcourir, le sentier va grimper sur toute la première moitié de l'itinéraire. 1000m de dénivelé positif sur les 10 premiers kilomètres. Mais 1000m de D+ dans un lieu grandiose ! Des crêtes escarpées que l'on longe jusqu'à atteindre, 2h30 plus tard, un plateau immense avec comme seule vue : les montagnes. Aucune trace de vie, aucune trace de civilisation ici. Grandiose ! C'est exactement ça que je suis venue chercher en Islande. Mais pourquoi cette étape n'est-elle pas "officiellement" la dernière étape du Laugavegur trek ??


Tandis que certains randonneurs peinent à se hisser au point haut du jour, le col entre les volcans Eyjafjällajökull et Myrdalsjökull, d'autres galopent à une vitesse fulgurante. Des habitués peut-être ? La verte vallée de Porsmork a laissé place à des hauts plateaux de roche, de terre et de cendre. Il faut dire qu'on grimpe : 1200m de dénivelé positif, avec 15kg sur le dos, pour monter au col. Peu à peu, la neige s'invite, de même qu'un vent glacial. Nous sommes au col.

Ce n'est pas un petit col bien identifiable que nous traversons là. Le "col" fait plusieurs kilomètres de largeur et nous ne voyons même pas les volcans. Le vent se déchaîne et il fait vraiment très froid ! Le ciel s'obscurcit, on n'est pas prêt de s'arrêter pour manger...


Quelques minutes de pause pour manger un peu, mais aucun endroit pour se mettre à l'abri. Qu'une envie : redescendre plus bas en altitude pour se réchauffer ! Mais la route est encore longue. Sur ce col entre les deux volcans, où nous traversons les vestiges de l'éruption de 2010, le sentier n'est que peu balisé, et nous avançons un peu au hasard.

Nous nous retrouvons sur un sentier (balisé en rouge) qui est en fait une variante du parcours classique. Beaucoup moins emprunté, beaucoup sauvage et beaucoup plus... long. Quelques km de plus, mais puisqu'on y est, on y reste ! 

Ca y est, ça redescend enfin. Le long d'une rivière d'abord, née des glaciers que nous venons de traverser. La rivière, retrouvant d'autres semblables, s'élargit petit à petit jusqu'à devenir un cours d'eau beaucoup plus important qu'il est impossible de traverser. Nous sommes toujours au milieu d'un paysage désertique, froid et peu avenant. C'est pourtant avec un sentiment surréaliste de calme et de bien-être que nous évoluons ici. C'est fou comme le fait de se retrouver loin de tout, seul avec la nature, seul face aux conditions météorologiques et seul face à l'immensité des montagnes peut vous faire grandir. Un nouveau stade de l'évolution humaine : man/woman into the wild.


Et puis parce que tout a une fin. Puisque si ce voyage n'était pas éphémère il ne serait pas extraordinaire. SKOGAR et ses cascades. Une pure merveille pour clôturer l'une des plus belles randonnées que j'ai pu réaliser pendant ma courte vie. Une randonnée qui ne laisse pas indifférent. Une randonnée que l'on ne peut pas oublier.

Remerciements
Un beau voyage qui n'aurait pas pu prendre forme sans :
Mon cher et tendre, mon compagnon du quotidien et d'aventures
Mes parents qui ont assuré sur la logistique, et mon papa qui nous a confectionné de nombreuses petites choses bien utiles lors de cette expédition en autonomie complète
Mes partenaires qui m'ont fait confiance et m'ont permis de randonner bien équipée : Cimalp, Feelactiv, Katadyn, Baroudeur Altitude.


POUR PREPARER VOTRE VOYAGE, DES LIENS UTILES :

Matériel : liste et conseils (bientôt en ligne)
Le trek du Laugavegur d'Islande : informations pratiques (bientôt en ligne)

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